H - Bernard Minier
H
Bernard Minier
XO Éditions / 2025
539 pages
Dans l’épilogue de « Un œil dans la nuit », l’auteur nous abandonnait en plein suspense, sur ces six dernières lettres « COUPEZ », un ultime mot suivi du silence d’une bobine de cinéma tournant désormais dans le vide.
À présent, la bobine est rechargée avec un nouveau film et Bernard Minier nous dévoile cet énigmatique « H » !
Je ne vais pas vous résumer l’histoire, cela ne vous servira à rien. Sachez simplement que la présence du tueur en série suisse Hirtmann demeure ancré dans un bon nombre de rebondissements et encré sur une bonne partie de ces pages.
Je vais plutôt vous expliquer ce que j’ai vraiment apprécié. Dans les bouquins de B. Minier, c’est très souvent les « à-côtés » qui me fascinent, respectivement la matière utilisée pour façonner l’intrigue.
Dans ce millésime, je retiendrai deux aspects qui m’ont particulièrement marqué. D’une part, cette inspiration du réelle mêlée à la fiction et, d’autre part, l’utilisation de ce phénomène qu’est le web sleuthing, cette pratique de plus en plus répandue qui consiste à enquêter en « amateur », par réseaux, sur des crimes, avec les moyens qu’offre le net.
J’ai aimé cette réflexion mise en scène par l’auteur. Oui, une réflexion. Car ce principe remet pas mal en question l’investigation policière, avec ses limites légales, d’effectifs ou même par rapport à ses priorités liées à la politique ou aux moyens. Quant aux réseaux d’amateurs, hyper fournis en moyens, ils ne sont confrontés quasiment à aucune contrainte. Bref, ça se discute !
L’auteur place également sous le feu des projecteurs des personnes qui n’en auraient pas forcément besoin tellement elles brillent déjà par leur connerie. Nous avons ici l’exemple-type du présentateur de talk-show pathétique - dangereux ! - qui joue avec le malheur des gens, qui se pavane comme un coq tout en étant hors de la réalité. Bref, c’est la représentation de la belle grosse fiente comme nous adorons les détester.
Au cœur de cette intrigue, un triangle à peu près équilatéral va se former, composé de la PJ, d’une journaliste coriace et d’une équipe d’investigateurs amateurs. Et peut-être aussi de ce présentateur-vedette qui pourrait se rouler des pelles à lui-même s’il avait la double mâchoire de la créature de Alien.
L’auteur nous pousse au cœur-même d’une situation assez écœurante, mais pas d’un simple et gros coup de pied dans le cul, mais plutôt avec finesse, en nous permettant d’être témoins d’investigations solides.
Au final, vous découvrez ici une fiction bien réelle, qui dévoile des vérités aussi justes et précises qu’un mensonge, animée de personnages très présents, surtout ceux que l’on ne croise pas.
Et lorsque je parle de vérité, je fais référence à une notion qui a perdu son essence dans cette société où chacun est amené à adhérer à ce qui lui convient, que cela soit authentique ou pure fake-news. Après tout, quelle importance … …
Bernard Minier remet en question ces notions de vérité et de réel, avec une histoire que vous ne lâcherez sans doute pas. Elle, elle ne vous lâchera pas.
À lire.