Le village perdu, Camilla Sten

Publié le par Pascal K.

Le village perdu
Camilla Sten

Éditions Points / 2021
415 pages 

En 1959, la totalité des habitants d’une petite ville minière suédoise disparaît du jour au lendemain. Encore aujourd’hui, cet événement reste une énigme. Alice Lindstedt, dont la grand-mère est née là-bas, va se rendre sur place, avec une petite équipe, dans le but de monter un film documentaire sur ce village fantôme.

Ce qui m’émerveille en tournant les premières pages de ce livre, c’est la qualité du décor, ou plutôt la capacité dont fait preuve l’auteure pour nous embarquer dans son monde. C’est une atmosphère aussi pesante qu’aérienne, mais également inquiétante qui viendra titiller chacun de nos sens. L’environnement viendra finalement occuper la place d’un personnage à part entière, et quel personnage !

En nous permettant de nous frayer un chemin menant au passé, Camilla Sten nous offre la possibilité d’observer ce qui n’existe plus. Ces voyages temporels passé-présent, agrémentés d’archives et de quelques lettres émanant de cette époque, confère une énergie fascinante et désarmante au récit.

La tension qui naît de ces pages est plus que palpable. Côtoyer cette petite équipe de tournage en repérage dans ce village abandonné fait froid dans le dos. Je ne suis pas du genre à sursauter ou avoir le sang qui se glace en tournant des pages mais là, je dois l’admettre, j’ai eu quelques sueurs froides. L’auteure joue avec nos nerfs en usant de méthodes plutôt classiques mais ô combien efficaces. Des sons, des flashs, de la méfiance - paranoïa ? -, c’est très efficace. Les quelques personnages – leur état d’esprit ! - qui évoluent dans ce no man’s land n’y sont de loin pas étrangers.

Si vous avez vu à l’époque « Le Projet Blair Witch », vous aurez de toute manière une pensée pour ce film de 1999 jouant sur la tension psychologique et l’imagination.

Camilla Sten met en lumière et dénonce - j’espère … - la mauvaise influence que peut avoir un rassembleur, à l’image d’un pasteur à qui vous donneriez le bon dieu sans confession, ou encore la haine qu’on peut engendrer - propager ! - envers une personne différente. Plus vous tournerez les pages, plus l’image qui se dessinera vous paraîtra nauséabonde et infecte. 

L’auteure pousse à son paroxysme l’effet que peut procurer la puissance d’une manipulation effectuée au bon moment, envers les bonnes personnes, en usant des meilleurs arguments. Je ne trouve que difficilement les mots pour qualifier l’ampleur de la perversion qui émane de ces pages truffées de saleté et de pourriture. Mon opinion sur « ce genre de chose » se solidifie méchamment après une telle lecture. 

C’est rythmé, c’est tendu, c’est profond. Ce bouquin est à lire. 

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