Une rose et un balai, de Michel Simonet - coup de cœur!

Publié le par Paco

Une rose et un balai
Michel Simonet

Editions Faim de siècle / 2015
133 pages

Petite pause polars, thrillers et romans noirs pour vous parler de ce petit condensé de bon sens. Je me permets dès lors de donner un grand coup de balai sur mes lectures habituelles pour faire place à ce livre exceptionnel.


L'auteur, Michel Simonet, est un balayeur de rue. Mais attention, pas n'importe quelles rues, celles qui constituent la ville de Fribourg, patelin où je vis et je travaille. Et, -surtout! -, Michel Simonet n'est pas n'importe quel balayeur. C'est un personnage qui m'a fasciné par sa façon de s'exprimer, sa manière de voir les choses et surtout par sa manière d'être.

"Dénicher" les choses simples de la vie, se les approprier, - pour un instant ou pour toujours -, et les apprécier.

Les déchets de la société, Michel Simonet les connaît bien. Ceux qui se trouvent sur le trottoir, sur la route, un muret ou dans une cour. Il les chasse du paysage en dégainant son balai, par conviction, et non par obligation. Oui, car Michel Simonet ne fait pas ce métier noble sous contrainte, sous pression, mais par passion. Balayer les rues, c'est aussi l'occasion de côtoyer les personnes qui s'y trouvent et s'ouvrir sur un monde riche et passionnant. Bien entendu, c'est aussi croiser des emmerdeurs, parfois - Michel Simonet vous le dira aussi -, mais cela a-t-il peut-être aussi son charme? Ces emmerdeurs, j'ai aussi l'occasion de les côtoyer, mais j'avoue ne pas avoir le recul nécessaire pour y dénicher le charme qui en découle!

Avant de parler concrètement du contenu, je suis obligé de mettre en avant le style de l'auteur. Michel Simonet a une belle maîtrise des mots et ce fut pour moi un plaisir intense d'avoir pu en être témoin. Son texte est à l'image des rues après son passage: propre, agréable et brillant. Le souci du détail semble lui correspondre à la ville comme à la page.

L'auteur-balayeur joue avec les mots, avec une grande dextérité. Sous sa plume, ces mots et ces phrases prennent un sens profond avec une simplicité déconcertante. Michel Simonet semble aimer les mots et cela se ressent.

Le sens de ses mots donne un magnifique bon sens... J'espère que notre balayeur va ramasser encore un nombre incalculable de feuilles mortes pour y écrire des mots aussi vivants.

Par ces quelques lignes, nous avons l'occasion de visiter la ville, à travers les yeux et l'émotion d'un homme qui ne va pas par quatre chemins - au sens propre comme au figuré! - pour nous en parler. Des lieux disparus, modifiés, oubliés. Quel plaisir de se remémorer ces endroits qui, après de gros travaux urbains, sont désormais effacés, gommés de la ville. Je retiendrai le fameux "Triangle des Bermudes", près du feu Café des Alpes!

De balayeurs d'antan à balayeurs d'aujourd'hui, Michel Simonet a parcouru plusieurs dizaines d'années à travers les rues de Fribourg. Certaines mœurs ont changé, tant mieux pour les unes, dommage pour les autres. Quoi qu'il en soit, la mission reste toujours la même: il faut que cela soit propre.

Notre balayeur-philosophe nous parle de son travail avec franchise, passion, humanité, sans oublier de pousser tout de même quelques petits coups de gueule. Son job est une passion, mais il ne faut pas la pousser non plus. Les déchets reflètent d'une certaine manière la société qui les crée. Michel Simonet devient alors témoin de certains comportements - mauvais comportements ? -, de divers stades de respect - manque de respect? -, soit les agissements de notre population locale.

"Dis-moi ce que tu jettes, je te dirai qui tu es". Vous connaissez certainement cet adage que j'ai un peu modifié. Je pense qu'une personne comme Michel Simonet est en mesure de dresser un profil psychologique complet des habitants de notre ville en étudiant, en décomposant, en triant, en épluchant, en décortiquant, en analysant, en sondant, en examinant, en disséquant nos déchets!

Qu'il vente, qu'il neige, qu'il gèle ou qu'il fasse une chaleur de plomb, ces hommes en orange sont là, tous les jours, pour embellir nos rues, pour nettoyer et balayer nos trottoirs, pour rendre notre ville encore plus belle et plus sécurisée.

Avec son balai, il a également réussi à chasser un peu les quelques déchets qui stagnaient dans les recoins de ma tête, afin que j'y voie plus clair sur la vie, simple et très accessible. Mais comme dans son job, il faudra qu'il repasse quelques fois pour enlever les quelques déchets qui réapparaissent sans que je m'en aperçoive.

Si vous croisez un jour cet homme en orange muni d'un balai et poussant une brouette ornée d'une rose, dites-lui merci, ou pensez-le très fort.

Respect. Total.

Publié dans Littérature suisse

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B
C'est un ouvrage qui m’intéresse et je pense que je vais me le procurer.
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P
Un sacré homme ce Simonet!