La gula - Efsy Washington
La gula
Efsy Washington
Éditions Magnus / 2025
377 pages
Et merde à la morale supérieure, au politiquement correct … Ceux qui décident de plonger dans un thriller, un roman noir, ont le droit absolu d’être heurtés, et sans limite. Sans AUCUNE putain de barrière ! C’est bien ça que l’on veut, non ??
Lire l’avant-propos de ce bouquin, j’avoue, m’a donné des frissons. Et pour cause : l’auteur y défend justement ce qui me tient viscéralement à cœur : écrire sans garde-fous, sans censure, en envoyant chier cette foutue morale qui impose aux auteurs de thrillers une muselière aussi étroite qu’étouffante. Pourquoi soutenir une telle approche ? Simplement parce qu’elle reflète la société telle qu’elle est (devenue ?).
Dans ce récit aussi sombre que parfois insoutenable, l’auteur prend manifestement son pied. Les faits, relatés au présent - je suis fan de ce temps -, se déroulent avec une violence inouïe. Rien ne peut stopper cette progression brutale - dans tous ses états -, que vous le vouliez ou non. Bienvenue dans l’antre de l’être humain (notre société, donc …).
Ça va très très vite. Nous sommes dans du « live » - la force de ce fameux présent - et le récit ne nous lâche jamais. Du coup, nous non plus. L’auteur nous plonge dans la chute d’un homme politique français, accro au sexe et confronté à des accusations de viol sur mineure.
Nous croisons également une justicière assoiffée de vengeance, mais aussi une flic déterminée, et peut-être même ce tueur en série qui sévit depuis de nombreuses années. Quatre personnes, quatre destins, une histoire.
Avec un mélange de gore, de psychologie et d’enquêtes criminelles, l'auteur maîtrise parfaitement ce récit dont l'ambition reste constante : repousser toutes les limites et dire ce qu’il y a à dire, sans détour, sans aucune concession (c’est important).
Plusieurs sujets sensibles sont ici mis en lumière. Les réseaux sociaux - grands tribunaux de merde ! -, l’évolution - la disparition ? - des interactions humaines, mais aussi le phénomène du lynchage collectif qui s’opère d’une manière presque naturelle, instinctive, sans aucune recherche de preuves. C’est vraiment devenu un sport national !
L’auteur démontre également qu’il existe de véritables « monstres » dans notre société, mais aussi des personnes que nous percevons à tord - et gratuitement ! - comme tels, en alimentant constamment ces croyances. En fait, il s’agit simplement d’individus - des cibles ?! - avec leurs propres défauts ou imperfections, comme chacun d’entre nous, finalement. Mais comme nous ne sommes pas exposés …
Dans ce récit, l’auteur dénonce une société déviante, qui part en vrille, critiquant avec une grande honnêteté les dérives de la vindicte populaire, l’émergence de petits justiciers autoproclamés de bas-étage ou encore le wokisme. Ce qui fait peur, dans tout cela, c’est que cela fonctionne …
Je défends ce récit - peut-être serai-je l’un des rares à le faire, je n’en sais rien -, car il porte des valeurs qui me sont chères et, qu’aujourd’hui, j’ai de plus en plus de mal à défendre. La gula m’en empêche.
Bref, auteurs de thrillers et de romans noirs, je prie pour que vous puissiez écrire en toute Liberté, sans cette muselière qui devrait être réservée à d’autres !
La vraie vie peut être vache, jusqu’au bout, pas comme dans un thriller commercial …
A lire !