"Hématome", de Maud Mayeras - quel coup de maître!

Publié le par Paco

Hématome
Maud Mayeras

Calmann-Levy Edition / 2006
(Le Livre de Poche)
313 pages

Premier roman de Maud Mayeras. "Hématome", le mot est faible, croyez-moi. C'est du sang pur sang! Je reconnais avoir été bluffé, et ceci jusqu'à la dernière ligne. Ce thriller m'a terrassé, balayé et plaqué au sol.

La trame d'abord?

Une fille se réveille à l'hôpital après quatre jours de coma. Elle est cassée de partout. Les informations provenant des douleurs de son corps meurtri lui arrivent au cerveau avec violence, mais cela s'arrête là concernant ses neurones: Emma ne se souvient plus de rien, même pas de son nom. Par contre, le résultat de ses blessures ne laissent aucun doute sur ce qu'elle semble avoir subi. Abjecte.

Le récit nous est raconté par la victime. Elle nous exprime tous ses ressentis, ses souvenirs qui reviennent - au compte-gouttes-, ses douleurs, ses peurs et ce qu'elle endure en live. C'est "ici et maintenant", le lecteur et la victime ne font qu'un. Pas facile de vivre la vie de cette victime par procuration!

Nous découvrons ce personnage en même temps qu'il se découvre lui-même. Cette inconnue pour nous l'est aussi pour elle et c'est là que cela devient intéressant. Elle ne peut pas nous mentir, nous manipuler, car elle ne sait pas elle-même qui elle est. J'aime assez ça! Alors on découvre petit à petit, et elle aussi.

Les personnages qui gravitent autour d'elle ne nous aident pas beaucoup pour y voir clair. C'est trouble, c'est flou. Le voile que dépose l'auteur sur son intrigue est lourd, pesant. Lourd de sens. Lourd de sang.

Le lecteur ne pourra accorder aucune confiance aux personnages qui restent pour nous de simples emballages potentiels. Nous ne savons pas vraiment ce qu'il y a à l'intérieur, étant donné que nous évoluons à travers les yeux d'une victime amnésique.

Nous sommes donc contraints, avec la victime, d'assembler les pièces d'un puzzle qui n'a pas d'image. Ou alors, pour être un peu plus juste, je dirais plutôt que nous devons constituer un puzzle qui comporte la particularité suivante: une pièce sur dix représente une image, les neuf autres restent totalement blanches ou opaques.

L'auteure lèvera ce fameux voile, petit à petit, pour que nous puissions - en même temps que la victime -, y voir enfin un peu plus clair. Ce voile va s'élever doucement, presque trop doucement pour nos nerfs, pour nous dévoiler un passé terrifiant, pour nous conduire vers le pire, la cruauté à l'état brut.

Mais tout ceci n'est encore rien. L'auteure nous offre un dénouement que je ne vais pas oublier de sitôt. C'est une double, voire une triple baffe qu'elle nous administre dans la gueule (n'ayons pas peur des mots). Je n'ai pas vu venir, je n'ai eu aucune possibilité d'esquiver, et c'est tant mieux. Être surpris, cela fait tellement de bien!

Maud Mayeras nous manipule jusqu'au bout et, croyez-moi, cela fait mal lorsqu'on s'en rend compte. D'une part, parce que nous nous sommes fait avoir comme des bleus et, d'autre part, car l'intrigue finit sur une note grave qui résonne en moi inlassablement.

Je l’entends encore tellement elle m'a sonné...

Une dernière chose, et pas des moindres, l'auteure a réussi à faire naître en moi une pulsion qui m'anime que très rarement: j'ai envie ou même besoin de relire ce thriller en sachant à présent le fin mot de l'histoire. Cela ne m'arrive pas souvent et c'est un signe concret pour moi qui caractérise cette intrigue comme un petit chef-d'œuvre, rien que ça!

Bonne lecture.

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L
Pas forcément un style que j'affectionne trop mais vu votre enthousiasme, je le note.
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P
Il vaut largement la peine d'être lu
I
je suis en train de le dévorer à cet instant même. J'ai tellement hâte de connaître le dénouement. Je sens que ça va être du très très lourd
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P
C'est assez lourd je confirme :-)
A
Une lecture qui m'est restée en mémoire. Je m'étais fait prendre.
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