Jaune soufre, de Jacques Bablon

Jaune soufre
Jacques Bablon
Édition Jigal / 2018
191 pages
C’est avec un plaisir sincère que j’ouvre ce roman de Jacques Bablon, car j’aime son écriture nerveuse, sèche et sans concession. J’aime ses personnages atypiques, parfois violents, quelques fois cassés par la vie, souvent vulgaires, toujours attachants. Soit, j’aime ses histoires courtes qui en disent souvent long. Il y a de l’intensité ! Jacques Bablon nous raconte la vie, et elle est parfois moche pour certains.
En entrant dans cette histoire, nous nous sentons déjà oppressés et sur le qui-vive. Après seulement quelques pages tournées, une vie s’achève déjà brutalement et une autre débute dans l’insouciance. Le ton est brut, les paragraphes sont découpés à la serpe et les chapitres s’écroulent comme des dominos bien serrés.
Plusieurs destins vont se croiser ici, et de près : un frère et une sœur qui ignoraient encore, jusqu’à présent, l’existence l’un de l’autre. Ou encore un prénommé Rafa, fils d’une rebelle et révoltée - à juste titre ! -, laquelle a dû faire face, notamment, à des actes certes assumés mais extrêmement lourds à porter.
Toutes ces personnes, liées par le sang, si j’ose l’exprimer ainsi, vont prendre une direction qui les mènera vers l’inconnue, ou plutôt vers un renouveau, assurément contre le mur.
C’est sombre et dur. Les personnages sont d’une telle fragilité qu’ils nous feraient presque perdre tout espoir. Mais, paradoxalement, nous sentons une force qui se dégage de chacun d’eux.
Je dois admettre que l’auteur sait y faire avec ses personnages. En quelques rapides coups de crayon, il arrive à nous dresser leur portrait avec profondeur et une certaine intensité. Les personnes qui nous accompagnent dans cette histoire sont touchantes, vraies et surtout brutes, sans garniture superficielle.
Des tranches de vies vont ici se succéder et vont finir par se rejoindre.
La curiosité, les liens du sang, le manque de repères, la haine, la douleur, la perdition, les mauvaises décisions ou encore quelques concours de circonstances vont nous conduire vers un dénouement houleux et hasardeux. Le vent soufflant dans des directions différentes à chaque page tournée, nos personnages, - qui sont déjà à moitié engloutis par des eaux bien marécageuses -, vont avoir du mal à rejoindre le bord.
Au final, l’auteur nous livre une histoire courte, sèche, sans chichi, avec des protagonistes au bord de la rupture. Des hommes et des femmes qui s’accrochent tout de même à tout ce qu’ils peuvent, afin d’avancer toujours un peu plus loin dans un monde qui ne pardonne pas grand-chose, surtout pour celui qui n’est pas né sous une bonne étoile.
Bonne lecture.