Biotope, David Coulon

Publié le par Pascal K.

Biotope 
David Coulon

Éditions Cosmopolis / 2021
382 pages 

L’auteur balance un prologue qui a l’avantage de ne pas tergiverser pour nous annoncer la couleur. Noire. C’est radical.

Je remarque que David Coulon n’est pas du genre à agrémenter les faits pour éviter de choquer le lecteur. C’est cash, froid et sans détour. Cet écrivain m’a rapidement appâté avec une écriture brute et sans concession.

Le rythme soutenu de cette narration m’a charrié à travers les pages, presque en apnée. Il n’y a aucun répit. Cette structure narrative est très originale, détachée, presque sans âme. L’homme qui nous parle vient de sortir de prison. Son crime ? Avoir découpé un gamin en morceaux après l’avoir heurté accidentellement en voiture.

Ce personnage névrotique, qui restera pour nous anonyme, à priori très instable et aux pensées qui se bousculent, va nous narrer sa réinsertion chaotique.

Nous allons faire quelques détours par son passé, pour comprendre. L’histoire qui nous est alors servie est à la limite du soutenable mais on s’y accroche et on veut savoir, c’est addictif. C’est lourd, c’est vache, c’est cruel. Il n’y a pas que les faits qui sont abominables, mais aussi la façon de les présenter, les coucher sur le papier. L’auteur nous dévoile une putain de bonne écriture.

Cette manière d’écrire nous pousse sans cesse à accélérer la lecture et, paradoxalement, tout devient confus. Les pensées brouillonnes et désordonnées de notre narrateur nous désorientent totalement. Cet homme cache ou garde un lourd secret familial.

C’est trouble, c’est glauque, nous progressons par à-coups, à l’aide de demi-mots et nous restons ainsi emprisonnés dans une profonde incertitude. 

David Coulon nous place face à un phénomène qui me fascine, celui de la définition du bien ou du mal. A partir de quel moment, de quels actes, peut-on prétendre qu’une action est bien ou mal, juste ou non. D’un point de vue moral, qui le décide finalement ? 

L’auteur nous pousse vers certains dilemmes liés à la justice, en plaçant les proches de victimes sur une plaque brûlante à ce qui a trait à la vengeance. Cette dernière représente-t-elle une sorte de justice ? Exécuter une vengeance est-ce entrer dans le même moule qu’un criminel ? Sommes-nous moralement innocents après une vengeance dite « justifiée » ?

Est-ce réparateur ... ?

Ce récit gorgé de névrose va certainement vous mettre mal à l’aise, mais aussi vous coincer dans une sorte d’incompréhension. C’est voulu, évidemment. L’auteur va vous manipuler jusqu’au bout en gardant ses cartes maîtresses bien à l’abri. Mais n’ayez crainte, il vous les balancera sur la table au dernier moment. 

Une fois le bouquin refermé, vous allez pas mal gamberger, croyez-moi. 


Bonne lecture. 

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