Matrices - Céline Denjean
Matrices
Céline Denjean
Éditions Marabout - Black Lab / 2022
358 pages
Je découvre cette auteure qui ne perd pas une seule seconde pour nous enfouir dans son récit. L’accroche est efficace.
Une femme non identifiée, enceinte, courant de nuit sur une départementale, en pleine tempête, se fait heurter accidentellement par une voiture. Avant de lâcher son dernier souffle, elle aura juste le temps de murmurer qu’elle s’est enfuie et qu’il faut sauver « les autres ».
C’est un duo d’enquêtrices qui va tenter de démêler cette étrange affaire, deux femmes gendarmes plutôt complémentaires, dont l’une va nous dévoiler sa vie, son passé, sa peine, sa tragédie. J’ai trouvé ce personnage intéressant, car il illustre parfaitement bien ce principe de protection – ce masque que l’on se pare ! – qui permet de cloisonner et filtrer ce que l’on veut bien montrer de sa personne en souffrance.
Plusieurs artères nous mèneront vers le cœur de l’intrigue. En vous référant au titre de ce bouquin, vous pouvez bien imaginer que l’une d’elle concerne la procréation. Je crois que c’est le meilleur terme que je peux utiliser tout en restant neutre.
Céline Denjean arrive à nous soumettre une situation immonde et barbare impliquant des victimes qui n’ont accès qu’à l’enfer, qu’au pire, parfois au « moins mauvais », mais jamais au meilleur. Ça n’existe pas. L’espoir n’est qu’un mirage qui a déjà disparu avant même de l’avoir regardé.
Nous pénètrerons également dans le noyau de quelques cercles familiaux bien différents, ayant tous un point commun assez prononcé, à savoir un dysfonctionnement aussi absolu que sournois.
L’auteur gratte avec insistance cette couche épaisse et bien tassée qui nous sépare de ces intimités familiales plutôt inavouables, des actes aussi cyniques qu’immoraux, non assumés pour certains. Franchement, il faut le dire, c’est assez cruel dans le genre !
Ce récit fait converger une enquête, des actes et des conséquences vers un même point. La situation qui en résulte devient alors inextricable et, pour moi, cet état de fait est carrément jubilatoire. Oui, l’auteur a réussi à engendrer, avec « Matrices », un scénario efficace, tangible et surtout redoutable.
La fin justifie-t-elle les moyens ? Très certainement, mais il faut y mettre le prix.
A lire.