Toute la violence des hommes, Paul Colize

Publié le par Pascal K.

Toute la violence des hommes
Paul Colize

Éditions Hervé Chopin / 2020
318 pages 

Je découvre l’univers de l’auteur avec ce titre ! Nous plongeons ici en ayant pris pas mal de hauteur pour bien nous immerger en profondeur dans les abysses de l’âme humaine, l’aspect psychiatrique étant l’une des clés de cette intrigue. Regagner la surface sera un sacerdoce.

Ce n’est pas uniquement dans les sinuosités du cerveau que nous nous perdrons, mais également dans le passé, lors du massacre sanglant de Vukovar, à la frontière serbo-croate, où tout a peut-être commencé. 

Le personnage qui nous occupe - préoccupe ! - présente des troubles difficilement explicables et nous comptons évidemment sur l’auteur - ses personnages ! - pour décortiquer ce cerveau dysfonctionnel. 

Nicola Stankovic est un homme qui paraît innocent, mais que tout accuse. Cet artiste peintre, aux nombreuses fresques plutôt inquiétantes et controversées, visibles sur quelques bâtiments bruxellois, est clairement suspecté d’assassinat. Les faits sont accablants. Sa principale défense se résumera en ces quelques mots : « ce n’est pas moi ». 

Je ne vais évidemment pas entrer dans les détails mais, une fois de plus, comment différencier le bien du mal ? Qui peut prétendre être assez sage et éclairé sur cette terre pour en juger ? Éternelle question liée à la justice des hommes ... 

L’auteur met en avant plusieurs aspects aussi intéressants que discutables, comme notre approche vis-à-vis de l’art, en particulier ces gigantesques fresques peintes sur les bâtiments. L’éternel débat restera de pouvoir déterminer si une œuvre représente l’Art, une dégradation, une injure, une représentation de la violence ou alors tout simplement un talent fou respectable, respecté et salué. Tout est relatif ! Par contre, il y a toujours un message derrière l’œuvre. Un fait de société ?

Paul Colize va aller encore un peu plus loin. Lier l’art à la folie serait-il un de ces clichés sans réel fondement ? Nous allons arpenter bien des couloirs d’un institut psychiatrique, décortiquer une âme perturbée et même nous immiscer dans certaines confidences liées à cet art abstrait qu’est la psychiatrie - oui, c’est aussi un art ! -, pour pouvoir répondre à cette question. 

Internement, responsabilités réduites ou carrément gommées, dangerosité évaluée sur le comportement par l’observation, voici quelques éléments qui seront analysés dans ce récit. 

Extérioriser ses profondes souffrances par la représentation graphique est-il une thérapie ? Un exutoire ? Un besoin vital ? C’est peut-être tout cela à la fois. Quoiqu’il en soit, ce décryptage de l’âme passera aussi par le côté artistique. Fascinant. 

Paul Colize nous inflige des scènes insupportables du passé en nous cachant dans des caves d’immeubles de Vukovar, ou au centre de cette ville s’effondrant sous les obus, où nous devenons témoins d’un massacre inouï, un carnage presque oublié à ce jour, une purge méthodique qui n’intéressait pas grand monde à l’époque ! Et dans l’œil du cyclone, un petit garçon ... 

L’auteur extériorise et nous traduit l’expression d’un solide traumatisme. L’Art, la peinture - gage de liberté et d’exutoire - ou la psychiatrie vont nous permettre de retracer le parcours d’un individu victime de toute la violence des hommes !  

À lire ! Bonne lecture. 

Publié dans Littérature belge

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A
Pas certaine d'être tentée par cette extériorisation de la violence.
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P
C'est bien amené, et original !