La Bataille, Patrick Rambaud -- Toujours avoir un coup d'avance !

Publié le par Pascal K.

La bataille
Patrick Rambaud

Éditions Grasset / 1997
302 pages


Voici le premier tome d’une trilogie napoléonienne revisitant quelques unes de ses batailles. Un récit mettant en avant la vie des personnages, leurs états d’âme, leurs inquiétudes ou leur savoir-faire, c’est très vivant ! Tout ceci sur un fond d’Histoire extrêmement bien étayé.

L’auteur, selon les références, s’est minutieusement documenté pour nous fournir le maximum de détails sur cette bataille, les personnages, les lieux ou l’atmosphère, tout en respectant la réalité des faits, selon moult témoignages de l’époque. Fascinant !

Patrick Rambaud nous conte ici la bataille d’Essling, menée par l’Empereur Napoléon Bonaparte contre les Autrichiens, à proximité de Vienne, du 20 au 22 mai 1809. Des dizaines de milliers de morts dans les deux camps, une multitude de blessés et une petite victoire pour l’Autriche.

Tenant la rive droite du Danube, l’intention de Napoléon est de construire un pont flottant afin d’atteindre l’autre rive, tenue par les Autrichiens et située à une distance d’environ 800 mètres. L’île marécageuse de Lobau, qui se trouve à environ 700 mètres de la rive droite et à environ 100 mètres de la rive gauche, sera un grand atout géographique et stratégique pour la réalisation de cette mission !

Voilà pour l’Histoire. Pour l’histoire, l’auteur nous enfouit rapidement dans le décor avec une écriture que je qualifie de « connaisseuse » et forte en termes liés à l’époque. Le dictionnaire est de mise si vous souhaitez mettre une image sur chaque objet cité. Les personnages, pour la plupart des soldats, sont on ne peut mieux décrits. Que cela soit le langage, les postures ou encore les accoutrements, nous sommes complètement sur le pied de guerre.

C’est vivant. Patrick Rambaud a la capacité de nous placer face à une continuité de tableaux, son écriture dépeignant si bien les divers plans qui constituent ce récit.

Surprenant d’avoir comme personnages des protagonistes tels que Napoléon ou André Masséna, des individus que nous connaissons plus ou moins par leurs batailles, mais nettement moins au niveau de leur personnalité.

Napoléon nous est dépeint comme étant impatient, colérique, calculateur doté d’une grande notion de stratégie et d’une vision large. Un type un peu menteur, quand cela l’arrange, et qu’il ne faut surtout pas contredire !

Entre une ville de Vienne occupée et un champ de bataille en préparation, mis en sourdine, avec une tension permanente - le calme avant la tempête ! -, nous serons au plus près des hommes, dans leur esprit, en partageant leurs peurs, leurs angoisses et peut-être aussi leur ras-le-bol de la guerre, voire même de leur Empereur avide de pouvoir. C’est très humain.

Nous aurons même droit à un peu d’amour dans cet univers de travail forcé et de tuerie. Comme quoi, on peut toujours trouver un peu de réconfort dans le feu de l’action et la proximité de la mort. Surtout dans ces conditions !

Mais cet aspect-là sera vite atténué par l’odeur de la poudre, effacé à coups d’obus et de baïonnettes, lors d’une bataille sanglante, rude et épuisante. L’auteur nous donne plusieurs coups dans le dos pour nous pousser vers ce champ de bataille et ainsi nous placer aux premières loges.

Bouillies sanglantes et gélatineuses, bouts de crânes défoncés ou encore des morceaux de soldats agonisants, notre parcours sur ce champ de bataille est un véritable enfer.

Morts ou blessés, c’est presque du pareil au même. Autant être mort quand tu vois que le médecin de camp, tel un boucher, s’acharne à coups de scie pour combattre les gangrènes ! Une croix sur le front - condamné -, on passe au suivant. On scie, on lance les membres dans un tas, on scie encore, on tente de sauver les bouts de soldats !

Ce récit est fort instructif et présenté comme une aventure. L’Histoire est déjà écrite mais l’auteur déroule son histoire d’une manière remarquable. Un soldat, à cette époque, était un véritable combattant ! Ce récit pue la mort, mais place en avant la présence d’un courage incroyable.

Finalement, passer d’une victoire à une défaite, ou vice versa, ne tient parfois presque à rien. C’est ce que je retiendrai, avec le courage et la loyauté des hommes !

Bonne lecture. 

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A
Des batailles du point de vu des soldats ?
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P
Oui. Et de Napoléon. Nous sommes vraiment à leurs côtés