L'affaire Perceval, Pascal Martin --- L'ombre et la lumière ...
L’affaire Perceval
Pascal Martin
Éditions Jigal / 2019
255 pages
Pascal Martin m’avait agréablement surpris avec une histoire bien noire, malsaine, éditée en 2017 chez Jigal, avec « La Reine Noire ».
Je retiens encore ces dialogues mémorables et remarquables, mais aussi ce petit village troublant qui renie un passé répugnant, des personnages vrais, authentiques ou encore ce putain de rythme qui ne compte quasiment aucun temps mort.
C’est donc plutôt avec optimisme que j’ouvre ce nouveau millésime de Pascal Martin !
Ici, nous suivrons de près Perceval. Cet homme est une star du petit écran, un journaliste provocateur, un agitateur dans l’âme. Il aime faire rire son auditoire, faire le trublion et jouer avec les limites du politiquement correct. Perceval aime manipuler son monde pour atteindre le public. Lors de son talk-show, tout le monde y passe, surtout les personnalités politiques.
Jouer avec les limites génère son lot d’inconvénients : cet homme est en danger. L’écarter, voire l’éliminer, semble être une priorité. Une solution !
L’auteur nous enfouit dans l’univers de l’audimat, du chiffre et de la performance. Provoquer, déranger et chercher l’aspect pertinent d’un fait divers en devient la raison d’être ou de paraître. Oui, paraître. Tirer les vers du nez, soutirer des propos à l’arracher, sans en avoir l’air, semble être tout un art !
Le ton de ce récit est vif, saccadé et froid. Pascal Martin écrit en appuyant fort, jusqu’à déchirer quelques pages. Les personnages qui évoluent dans cette histoire sont aussi vifs et acérés que l’écriture. Ce ton me convient, ça déchire pas mal - comme les quelques pages qui ont morflé sous la plume de Pascal Martin - et du coup ça avance !
L’aspect narcissique est très présent dans ce récit. Le fait d’être égocentrique - survivre au dépend de cet état ! - peut facilement causer votre perte. L’auteur le relève d’une manière efficace et, encore une fois, très froide. Perceval, notre homme de l'ombre et de la lumière, aime les gens, mais s'aime avant tout.
Ce récit glacial, écrit au présent, fonctionne fichtrement bien. C’est simple - tellement simple ! - et paradoxalement très subtile. L’auteur arrive parfaitement à mettre en évidence les deux faces que peut afficher un individu : la face visible et la face cachée. Dans la vie de tous les jours, c’est déjà le cas pour la plupart d’entre nous mais, pour une personne publique, cela devient déjà plus pervers, amoral et, d’une certaine manière, plus violent.
Cette histoire, enduite d'un cynisme qui nous colle à la peau, est terriblement sombre et désespérante, dans le sens où nous sommes témoins d’une vie affligeante, fausse et biaisée.
L’intrigue mise en place est très animée, énergique et nous pousse rapidement vers une sortie que nous apercevons d’une manière de plus en plus nette. Un trouble demeurera toutefois et cet aspect-là de la trame sera justement cette fameuse subtilité.
Les spécificités liées à la nature humaine sont très éloquentes et nous donnent pas mal d’indications sur toute la bassesse dont peuvent faire preuve nos semblables. Certaines sensibilités sont, d’une certaine manière, bien mises à mal.
Pascal Martin nous place derrière et devant une caméra de télévision. Mais, franchement, où faut-il se placer pour être au bon endroit ? Une vraie mascarade psychologique ! A lire !
Bonne lecture.