Surface, Olivier Norek --- Jusqu'à déterrer le passé !
Surface
Olivier Norek
Editions Michel Lafon / 2019
425 pages
L’univers de Norek, c’est trois polars authentiques, fixés sur le papier au 9 mm, nous éjectant avec les douilles dans de puissantes intrigues, laissant indubitablement le lecteur sur le carreau. Le quatrième bouquin, plus intime - sensible ? -, ne laisse pas non plus le lecteur indemne, en offrant cette fois-ci une trame plutôt poignante.
En ouvrant ce millésime, le calme apaisant de votre environnement de lecture se déchire immédiatement. Des sons, du sang, de la vitesse et de la tension se libèrent et passent librement entre vos doigts qui viennent de tourner la première page.
L’ambiance flic que j’affectionne tant est bien là. C’est cash, rapide, froid et terriblement vrai. Norek vient de m’appâter.
Une tragique intervention, effectuée par le groupe des stups conduit par le capitaine Noémie Chastain, vient de se dérouler en live devant nos yeux. Ils ont ramassé dans la gueule, on ne gagne pas toujours.
On ralentit ensuite un peu, pour mieux aller en profondeur ...
Olivier Norek nous oriente ici, avec une partie de cette histoire, vers les difficultés liées à la différence et l’acceptation de soi. Mais aussi, par définition, l’acceptation d’une personne différente ! Nous sommes toujours dans le milieu flic, mais cette fois-ci avec une caméra qui zoome constamment sur l’intimité, sur le policier, sur l’être humain !
Nous aurons l’occasion de croiser des personnes avec de belles valeurs humaines, comme la lâcheté, le dégoût, l’indélicatesse ou encore peut-être la rivalité mal placée, soit toute la bassesse que l’être humain est capable de fournir. Est-ce que le sentiment de malaise rend bête ou débile ?
Face à cette panoplie d’avilissement, nous pourrons par contre capter des valeurs bien plus nobles, comme la force, la ténacité ou la résistance.
Olivier Norek s’attaque ici au traumatisme, mental et physique, ses conséquences, mais aussi les qualités qu’il faut développer pour pouvoir les combattre, les accepter, les comprendre pour enfin les apprivoiser. Le monde extérieur devient alors un ring sur lequel il faut lutter pour, d’une part, faire sa place et, d’autre part, la conserver.
La différence et le rejet s’associent bien trop facilement.
Le personnage dont je fais référence avec tous ces qualificatifs, c’est le capitaine Noémie Chastain. Mutée en campagne pour des raisons de santé, elle va endosser un rôle professionnel délicat, avec une mission assez ingrate.
L'ambiance rurale ! On ne travaille pas à la ville comme à la campagne ! Je retiendrai les propos du commandant du commissariat du petit patelin qui stipulent que l’humain est le centre de l’enquête; on connaît chaque habitant, sa vie, ses habitudes, ses secrets, ses amis et ses ennemis. Pas besoin de scientifiques. J’adore, car c’est tout simplement la base du boulot de flic !
Quant à Noémie Chastain, qui essaye de s’échapper dans l’action ou de se fondre dans la fonction, elle devra peut-être tenter autre chose pour pouvoir vivre ou même simplement survivre.
C’est en allant regarder la surface du lac que le rythme va quelque peu changer pour elle, mais aussi pour ce petit commissariat de campagne, voire pour tous les habitants du village. Les eaux ont décidé d’offrir un joli présent : le cadavre d’un enfant enfermé dans un tonneau.
L’enquête nous emmènera alors dans le passé de cette petite région qui ne demande qu’à cracher la vérité. Il faudra peut-être juste lui tirer un peu les vers du nez pour en faciliter la transparence ...
Notre enquêtrice devra creuser juste pour tenter d’arracher de vieilles racines pourries mais, encore une fois, la merde qu’on essaye de couvrir sent parfois tellement fort qu’il n’est pas forcément nécessaire de trop creuser. Il suffit de donner les bons coups de pelle au bon endroit, au bon moment, avec la manière et le style !
Norek place devant nos yeux une battante, une femme flic qui en veut, qui en demande et qui, surtout, va dans une direction que chaque flic sur terre devrait prendre : celle de la recherche de la vérité, quoiqu’il arrive.
Le ton de ce roman est très cassant, sarcastique, froid et, paradoxalement, très chaleureux et affable. Une certaine force et une grande détermination se dégagent de ces pages. Ce texte est un combat pour le gain de la confiance, mais surtout pour prouver sa valeur !
Le personnage de Noémie Chastain est grand. Un fort mental sur pattes ! Cette femme au franc-parler, à l’autorité surnaturelle est absolument éblouissante ! Cette personne est un vrai exemple.
J’aime son sarcasme, son côté piquant, sa motivation et son bagou. Je suis fan de son côté « rien à foutre, peur de rien, de personne, c’est le résultat qui compte ». J’aime son sens des responsabilités et sa combativité. Cette femme, qui ne craint pas d’aller au casse-pipe, m’a tout simplement impressionné.
C’est dans cette petite région tranquille de l’Aveyron qu’un ouragan au nom de Noémie Chastain va absolument tout arracher et déterrer.
Le dénouement de cette enquête, qui nous arrive un peu à la Hercule Poirot, est une accumulation de petits rebondissements, à l’image de quelques vagues qui viennent perturber le calme plat de la surface de l’eau.
Olivier Norek fait très fort ici en mettant en scène un personnage que je ne demande qu’à revoir et de toute urgence ! Une femme qui a compris, je pense, ce qu’est l’essentiel et qui a compris comment y aller au plus vite. Point négatif ? J'aurais souhaité que l'auteur traite davantage la personnalité de cette femme face à son handicap.
Bonne lecture.