"Le vertige des falaises", de Gilles Paris
Le vertige des falaises
Gilles Paris
Éditions Plon / 2017
245 pages
Selon ma propre expérience, lire du Gilles Paris, c'est se mettre dans la peau d'un gosse et ressentir sa vie de môme. Ouvrir un roman de Gilles Paris, c'est ouvrir son cœur et son âme pour accompagner et suivre un bout de parcours d'un enfant qui en chie. (Désolé pour l'expression).
Mais c'est aussi, paradoxalement, une ouverture vers l'espoir. Oui, car quand on est gosse, on a encore toute la vie devant nous, normalement.
Gilles Paris a l'incroyable capacité de se mettre dans la peau d'un enfant et, surtout, de nous raconter une histoire avec l'âme et les mots de ce jeune personnage.
Dans ce livre-là, ce sera encore une fois le cas. Nous découvrons la petite Marnie, 14 ans, le jour de l'enterrement de son père. Nous sommes sur une petite île, sans pour autant savoir laquelle. Moi ça me fait un peu penser à la Bretagne, pour ses falaises, ses vents violents ou encore pour le climat pas trop clément.
Les comparaisons s'arrêteront là car nous sommes vraiment sur une petite île où tout semble figé, où la technologie n'a pas sa place, sur laquelle les touristes ne s'aventurent pas, mais une île qui plaît à Marnie, surtout pour aller s'aventurer sur les falaises, parfois avec sa sœur de cœur, Jane, qui est aveugle.
Marnie est une ado difficile à apprivoiser, parfois colérique, qui peut même fuguer plusieurs jours sans même se soucier des inquiétudes de sa mère, atteinte d'un cancer, ou de sa grand-mère. Elle a ses raisons, c'est certain.
Elle a peut-être vécu le pire des maux pour un enfant: une certaine indifférence.
Et cette petite ne dévoile absolument rien, surtout pas ses sentiments. Mais à nous, elle en dira un peu plus, notamment sur son vécu familial. Curieuse, toujours une oreille quelque part, elle en connaît un rayon sur sa famille, - les choses d'adultes -, les secrets qui n'auraient pas dû arriver jusqu'à elle.
Dans ces secrets de famille, nous allons y mettre le nez jusqu'au fond des narines. Chacun, à tour de rôle, va nous transmettre un bout de sa vie, au gré des chapitres: Marnie, sa grand-mère, sa mère, et ainsi de suite. Gilles Paris donne la parole à tout le monde. On avance et on s'enfonce. Oui, car cette famille, elle en a des choses à nous raconter! Et ce n'est pas très réjouissant. C'est même abject. On s'enfonce dans de la boue bien dégueue, on patauge et on compatit.
Il y a des choses que l'on ne dit pas, par honte, par fierté, par peur ou même par amour. Dans bien des familles c'est pareil. On laisse glisser sur la surface une belle apparence, pour mieux cacher la pourriture qui ronge le tout à l'intérieur.
La jeune ado, Marnie, en a bien trop bavé, a subi trop d'événements non compatibles avec son âme d'enfant. Le poids de ces actes est beaucoup trop lourd pour ses jeunes épaules. Du coup, le cerveau réagit comme il sait si bien faire: il se protège par tous les moyens. Pour un enfant, cela sera la "fuite", l'isolement, mais aussi un processus qui revient souvent dans les histoires de l'auteur: la résilience, cette capacité à se reconstruire.
Gilles Paris nous raconte donc l'histoire de cette jeune ado - entre autre - qui se cherche un peu - beaucoup -, qui se perd parfois - souvent -, qui se pose mille questions pour tenter d'avancer, gentiment. Son père indigne, disparu - qui l'a toujours été, d'une certaine manière -, pèse lourd dans son sac à souffrance et Marnie a terriblement de mal à se défaire de ce poids. Elle a été traumatisée.
L'auteur nous raconte l'histoire d'une famille riche, mais dont la richesse ne permet pas de tout avoir. Il y a des choses qui ne s'achètent pas, c'est bien connu.
Gilles Paris, en définitive, nous raconte ce qui peut arriver un peu partout, malheureusement. On ne se doute pas toujours de ce qu'il peut se passer derrière la porte d'une maison. La narration de cette histoire est brillante, vraiment brillante, mais ce n'est, au final, pas mon genre de lecture.
Par contre, je sais y apprécier les bons côtés.
Bonne lecture.