"Nuit", de Bernard Minier
Nuit
Bernard Minier
XO Éditions / 2017
525 pages
Je ne vais pas vous présenter Bernard Minier. D'une part, il le fait très bien lui-même, par le biais de ses thrillers qui sont pour moi incontournables - du moins jusqu'à présent! - et, d'autre part, je préfère vous parler de son roman et entrer dans le vif du sujet!
Thrillers incontournables pour moi, c'est sûr, mais cela ne m'empêche pas d'être très objectif. Ici, je ne pourrai pas faire abstraction de quelques détails qui m'ont dérangé.
"Nuit"... Une jolie couverture! Avant d'ouvrir le roman, j'aperçois déjà un "personnage" dont j'ai fait mention dans chacune de mes chroniques: le décor. Dans l'univers de Minier, le décor joue le rôle d'un personnage à part entière. Ce décor, bien travaillé et fouillé, a la faculté de nous enfermer dans une sorte de huis-clos qui a la particularité paradoxale d'être en principe bien aéré!
Et, bien évidemment, le Commandant Martin Servaz, du SRPJ de Toulouse, fait désormais partie de ce décor!
Mais ce n'est pas lui qui aura l'honneur de nous introduire dans l'histoire, et nous ne démarrerons pas en France. Nous sommes dans un train de nuit, entre Oslo et Bergen, en Norvège. Nous voyageons avec un nouveau personnage, Kristen Nigaard, du service national d'investigations criminelles de Norvège. Cette femme se rend sur une scène de crime à Bergen, dans une église. La victime a été massacrée sur l'autel et un détail troublant, mettant en cause la flic, est présent sur la scène de crime.
Dès le départ, nous sommes confrontés à mon fameux personnage. Un décor froid, humide, sombre et maussade. La nuit est omniprésente, le noir est notre seule lumière. Il ne faudra pas trop compter sur une éventuelle éclaircie, en tout cas pas au niveau des faits.
L'enquête sur le meurtre de l'église va nous conduire sur une plateforme pétrolière, en pleine mer du Nord. La tempête nous poursuit et la pluie, encore, ne nous lâche plus; une eau glaciale nous fouette le visage en permanence. Et puis, d'une manière assez surprenante, le Commandant Martin Servaz fait enfin son entrée, dans un sale état.
Un lien est désormais tiré entre Martin Servaz, Kristen Nigaard et un autre personnage que je m'attendais évidemment à revoir, Julian Hirtmann, ancien Procureur suisse, tueur en série redoutablement intelligent. Un autre lien va être mis en avant, un cadeau empoisonné, une présence autant redoutable qu'innocente. Je vous laisserai le découvrir par vous-même.
Nous allons progresser en suivant les traces fraiches de ce tueur en série, nous allons constamment cheminer à l'ombre de cet homme totalement imprévisible, nous allons avancer vers lui - ou l'inverse! -, au côté de Martin Servaz, tout en regardant derrière nous, tout en observant le passé. Un passé que le Commandant de police tentait difficilement d'oublier.
L'auteur va très loin dans les descriptions, que cela soit pour les lieux, les événements ou encore pour les ressentis. C'est tout à son honneur, mais c'est tout à fait pesant, parfois. Le rythme, qui est le moteur d'un thriller, m'a paru quelques fois cassé, désordonné. Bernard Minier, généreux, nous donne beaucoup d'informations complémentaires, à savoir - comme je l'ai dit avant - beaucoup de renseignements descriptifs. C'est important mais, pour moi, c'est un peu trop.
Les personnages, encore une fois, sont impeccablement décrits! Aussi, la manière qu'utilise l'auteur pour nous amener les éléments d'enquête est également subtile, maîtrisée, et nous permet ainsi de garder une bonne pression dans les veines.
Bernard Minier nous mène au centre de cette enquête avec habileté. Briefing, présentation de l'état de la situation, rappel des faits antérieurs ou encore directions de l'enquête: le lecteur vit, en live, le déroulement de cette énigme criminelle.
Pas mal d'embûches, - pièges? - s'élèveront devant les enquêteurs, en particulier devant Servaz, évidemment. L'auteur n'a pas trop de mal à nous tenir en haleine, malgré les quelques longueurs dont j'ai fait mention. Je dois reconnaître qu'en cours de route, j'avais vraiment besoin de savoir qui était en train de placer ces nombreuses barrières à travers les chemins enneigés empruntés par ce flic assez tourmenté!
Bernard Minier aime nous faire languir, sans se presser, tout en plaçant sa trame, tranquillement, dans ce décor hivernal. Il nous fera peut-être même douter sur un personnage droit, juste et intègre. Et, au final, davantage de doutes vont s'ajouter vis à vis d'autres protagonistes de ce thriller, bien que j'aie assez rapidement vu venir certaines choses.
Proche du dénouement, l'auteur va accélérer la cadence, tout en imbriquant de nombreux rebondissements. La neige tombe toujours à la même vitesse, la pluie atteint le sol sans se précipiter davantage, le vent reste identique, fort et puissant, mais les évènements, eux, prennent de la vitesse et de l'ampleur!
Bernard Minier place un point à la fin de son histoire, mais cela ne sera pas un point final. En fermant ce livre, nous savons pertinemment que nous ne clôturons pas l'histoire impliquant Martin Servaz.
Un bon millésime, malgré ces quelques longueurs!
Bonne lecture.